18 Mai 1960
Real de Madrid bat Eintracht de Francfort 7 buts à 3 (3-1)
à Glasgow 135000 Spectateurs
Arbitre Mr Mpwatt (Ecosse)
Buts Di Stefano (27eme, 30eme, 75eme) Puskas (45eme, 56eme, 60eme, 71eme)
Kress (10eme), Stein (72eme, 74eme)
REAL MADRID
Dominguez - Marquitos, Pachin - Vidal, Santamaria, Zarraga - Canario, Del
Sol, Di Stefano, Puskas, Gento.
EINTRACHT FRANCFORT
Loy - Lutz, Hoefer - Weilbacher, Eigenbrodt, Stinka - Kress, Lindner, Stein,
Pfaff, Meier.
Analyse du regretté François Thébaud dans Miroir Sprint
Si l'on examine la partie dans son ensemble, on constate que le Real s'est
comporté dans cette finale comme une équipe de grande classe.
Durant plus d'une heure son action collective apparut soutenue, alors que
jusqu'ici, même dans ses meilleurs matches, les passages à vide dans ce
domaine alternaient avec les périodes brillantes.
Auteur de quatre buts, dont deux furent obtenus par des tirs foudroyants,
initiateur de magnifiques mouvements collectifs, combattant de tous les
instants, Puskas fut le footballeur le plus brillant sur la pelouse d'Hampden
Park.
Mais il est difficile de dire s'il fut -tout bien pesé - plus utile à son
équipe que Di Stefano.
L'Argentin signa de son côté trois buts, dont deux durant la période la
plus difficile puisqu'ils déterminèrent le renversement de situation en
faveur du Réal.
Dans le travail constructif , il manqua à la surprise générale plusieurs
passes faciles mais il déclencha et participa à des mouvements si nombreux
que ce "déchet" fut somme toute peu important.
Et, il ne faut pas oublier sa collaboration au travail défensif qui fut
si efficace dans la première demi-heure de la partie qu'il enleva à Stein
une occasion de but très favorable.
Del Sol joua en première mi-temps un rôle de premier plan, grâce à des
dribbles qui permirent à son équipe de conserver la balle, et grâce à des
infiltrations dangereuses dans le réseau défensif allemand.
Ensuite l'ancien joueur de Séville fatigué, baissa du pied.
Il en fut un peu de même de Canario, dont la participation aux deux premiers
buts fut essentielle.
En revanche, hormis l'excellente action qui permit à Pukas de marquer le
5e but et quelques départs en "une-deux" avec ses partenaires,
Gento fut le Gento individualiste que l'on a souvent connu.
La grande rapidité de son adversaire direct lui interdit même ces démarrages
spectaculaires qui impressionnent ses admirateurs.
En défense, si Zarraga, après un début pénible, effectua une bonne rentrée,
et si Dominguez et Santamaria eurent leur comportement habituel, Marquitos,
correct cette fois et très efficace, fut supérieur à un Pachin peut-être
fatigué par le récent match international Espagne-Angleterre, alors que
Vidal fournissait une exhibition moyenne.
Nous n'avons guère parlé de Francfort sinon pour signaler son entrée en
scène confiante et résolue.
Lorsque le Real trouva cohésion et rythme l'équipe allemande fut surclassée
comme ne le fut aucun des finalistes de la Coupe d'Europe.
Si l'aile droite de sa ligne d'avants exécuta avec le concours du centre-avant
Stein des combinaisons bien construites, l'abus de la passe longue chez
la plupart de ses joueurs, ne lui laissait aucune chance dontre des joueurs
de la valeur des madrilènes.
Des victoires sur des adversaires opérant dans le même style - Young Boys
et Glasgow Rangers - avaient crée des illusions concernant le caractère
"moderne" du jeu direct de l'Eintracht, le match de Hampden Park
a eu l'allure d'une mise au point définitive.
Si Kress, l'ailier droit, et Stein le centre-avant, sont des éléments de
classe incontestable, Pfaff, prématurément appelé le Di Stefano de Francfort,
n'a montré que les qualités qu'il possédait en 1954, c'est-à-dire des qualités
moyennes au niveau international.
Entre le vrai Di Stefano et lui, il y a une très grande classe d'écart.
Derrière ces trois joueurs, hormis Lutz, un arrière rapide et difficile
à manoeuvrer, on recherche en vain des éléments de valeur affirmée.
En revanche on y trouve un ailier gauche, Meier, au jeu primaire et dénudé
de clairvoyance, un demi-droit Weilbacher, dont le bagage se réduit au
jeu purement destructif et méchant un demi-aile Stinka et un demi-centre
Eigenbrodt, comme on en voit beaucoup, un arrière gauche Hoefer, dont la
rudesse est l'arme principale.
Au total une équipe de valeur internationale moyenne, inférieure à coup
sûr à Barcelone au C.D.N.A. Sofia, victimes des éliminations et au Stade
de Reims 1960 qui a une autre "répondant" technique.
Quelques mots avant de terminer sur l'attitude admirative du public de
Hampden Park à l'égard des vainqueurs.
Ce public qui avait assisté à l'écrasement des Rangers, le champion d'Ecosse,
par l'Eintracht de Francfort, a compris par comparaison visuelle et mathématique
que le football britannique doit radicalement modifier ses conceptions.
La Presse écossaise aussi si l'on en croit les professions de foi formulées
après le match par ses ténors.
Souhaitons que cette fois la leçon a été bien comprise et que le pays qui
fut le berceau du foorball cesse de vivre avec ses souvenirs.