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22 Mai 1943 Stade de Colombes
OM Bordeaux 4 à 0 ( 1 - 0 )
Arbitre Mr Sdez, 32500 spectateurs
Buts Aznar (32e et 62e), Dard (56e), Pironti
(78e)
OM Delachet - Patrone, Gonzales, Veneziano
- Bastien, Olej - Dard, Scotti, Aznar, Robin,
Pironti.
Bordeaux Gérard - Homar, Normand - Ben Ali, Mao,
Ben Arab - Rolland, Pruvot, Urtizbera, Persillon,
Arnaudeau
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Le début du match, joué au Parc des Princes
devant 32.500 spectateurs (recette record
: 1.207.000 francs), ressemble étrangement
à la rencontre du 9 mai.
Les Marseillais rapides, athlétiques, tout
de suite en action et attaquant en profondeur,
débordent de nouveau la défense bordelaise,
qui accumule les erreurs de frappe de balle,
les fautes de placement, et qui s'abandonne
au jeu le plus in-coordonné qui soit : demis
et arrières courent dans tous les sens, en
se gênant mutuellement et en livrant le champ
libre à l'adversaire. |
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A la 3e minute Normand laisse rebondir et
filer vers le but un ballon qu'il aurait
pu reprendre, mais qu'il préfère confier
à la vigilance et à l'arrêt de son gardien.
Mais Gérard se tient comme pétrifié sur sa
ligne de but et le point serait acquis sans
mal ni lutte par les Marseillais si le ballon
ne heurtait le montant droit, qui le repousse
!
Redoublent alors d'intensité les échappées
dangereuses de Dard et de Pironti, les deux
ailiers : les dribbles et les tirs d'Aznar,
l'avant centre,dont un sur la barre transversale
; le tout en six ou sept minutes de match
! |
A la 8e minute, Pironti se démet la clavicule
au cours d'une collision au sol avec Gérard
qui, plonge sur le ballon : il sort un moment
du terrain et voilà les dirigeants marseillais
consternés..
Toutefois, la domination de l'O.M. n'est
pas pour autant compromise : à la 15e minute,
une faute de mains commise, instinctivement
sans doute, mais volontairement aussi, dans
la surface de réparation, par Normand qui
n'a pas réussi jusqu'ici à remplacer définitivement
ses habitudes de joueur de rugby par les
réflexes du footballeur. L'arbitre M. Sdez
n'accorde pas le penalty, Robin s'étant emparé
du ballon pour ne rater le but que d'un rien. |
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Si l'unique point de la première mi-temps
est obtenu par Aznar à la 32e minute seulement,
c'est que l'heure n'a pas sonné où la défaite
girondine tournerait en déroute et presque
en débâcle.
Les signes avant-coureurs de la victoire
phocéenne se multiplient cependant, en même
temps que le spectre de l'échec bordelais
apparaît en surimpression dans l'atmosphère
passionnée du stade.
Si les Marseillais avaient mené à la mi-temps par 4-0 nul n'aurait crié
au scandale.
Qu'ils gagnent finalement par cette marque de 1-0 est à peine équitable
: une différence de six ou huit buts serait aussi justifiée.
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Il faut bien qu'ici nous donnions l'explication
du résultat, le plus lourd enregistré depuis
qu'existe la Coupe de France. Le motif tient
en quelques mots : il n'y eut, samedi, au
Parc des Princes, qu'une équipe sur le terrain.
On disait, au quartier des coureurs du Parc,
après la rencontre : Aznar et Bastien, si
ternes le 9 mai, se sont montrés aujourd'hui
sous leur vrai jour.
On déclarait aussi que l'équipe de l'O.M.
s'était présentée en meilleure condition
athlétique que pour la première finale, et
avec un moral bien supérieur, une unité de
volonté plus complète.
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Or, l'arrière Gonzalès n'était pas entièrement
rétabli du coup qu'il reçut de Ben Ali, le
9 mai, juste sous le genou, et vous savez
que le redoutable ailier gauche Pironti eut
la clavicule droite démise au bout de huit
minutes de match. |
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Cet accident n'empêcha pas Pironti de tenir
honorablement sa place, d'effectuer des passes
et des centres très habiles et de marquer
un superbe quatrième but, alors que le 9
mai, une fois son magnifique tir des premières
minutes réussi, il ne parvint plus à accomplir
d'exploit.Quant à l'esprit d'équipe, comment
voulez-vous qu'il ait été cultivé et exalté,
puisque Gonzalès et Bastien restèrent à Paris
pendant la quinzaine de l'entre-deux-finales
?Je crois, en définitive, que l'O.M. a été
égal à lui-même : qu'il a joué son jeu normal
: la guérison incomplète de Gonzalès ainsi
que la blessure à l'épaule de Pironti ne
l'ont pas empêché de surclasser les Girondins. |
Les Marseillais renouvellent dans l'ensemble, samedi, leur match du 9 mai.
Leur action est incisive, perçante, vigoureuse : dribbles, passes, déplacements
de jeu, tirs sont exécutés à vive cadence et avec force. Malgré le vent,
le ballon est plus facile à contrôler parce que le terrain a cette fois
été arrosé et la pelouse excellemment assouplie. A l'allant des Marseillais,
les Bordelais répondent par une carence totale, on dirait que, sauf Normand,
Ban Arab, Arnaudeau et Urtiz ils ne peuvent mettre un pied devant l'autre. Comme leur capitaine Gérard immobilisé sur sa ligne de but, ils semblent incapables de se déplacer et leur marquage, d'ordinaire compensé par la mobilité de course et la vitalité de jeu, tombe à zéro. Lorsque Aznar déclenche à la 32e minute, après une passe courte et simple de Pironti, un shot terrible qui troue les filets, il n'a, autour de lui aucun opposant dans un rayon de cinq ou six mètres, |
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. Pour le deuxième but, à la 56e minute, l'ailier droit Dard n'a qu'à passer Normand pour se trouver immédiatement en position de tir, loin d'adversaires immobilisés.
De même, Aznar, quand il marque, d'une admirable volée du gauche, le troisième but à la 64e minute, sur passe de Dard, dispose de la plus entière liberté d'évolutions.
Enfin Pironti, à l'instant où il place le
quatrième but, vers la 80e minute, de nouveau
sur passe de Dard, occupe une position si
confortable qu'il commence à lever les bras
d'allégresse avant même que le ballon ait
pénétré dans les filets !
Les Marseillais ont été de grands vainqueurs.
Ils se sont comportés en joueurs de division
nationale devant des adversaires médusés
de seconde division, et leur triplette d'avants
de pointe a pratiqué le football de plus
incisif, le plus moderne, le plus efficace
que l'on puisse souhaiter. . |
Les joueurs:
Aznar, Dard et Pironti évoluent et agissent en vainqueurs, comme à la parade. En quelques secondes et après une dizaine de foulées, ces trois hommes installés en maîtres dans le camp girondin se placent ou mettent leurs partenaires en position de tir.
Aznar, s'il était le moins du monde servi par la chance, marquerait trois ou quatre buts de plus En style, de son allure souple et bien équilibrée, il dribble ou il se prépare au shot, qui est aussi dur et aussi pur des deux pieds. Son match de samedi lui donne la première place, actuellement, parmi les avants centre français. |
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Dard, qui avait joué "tout fou",
il y a quinze jours, est, samedi, le grand
préparateur, le meilleur serviteur et un
bon réalisateur de la victoire marseillaise.
Il fait marquer deux buts et il en obtient
lui-même un, à un moment capital. Car les
Marseillais ont bien veillé à ne plus commettre
l'erreur du 9 mai lorsqu'ils menaient avec
deux buts d'avance : Dard n'est pas bien
en ligne quand il court : mais il va très
vite toute en contrôlant à merveille son
ballon et l'adversaire n'a pas le temps de
se préparer à la défense que déjà il est
passé. |
Pironti, il y a quinze jours, avait donné
l'impression d'être douillet d'une part,
mauvais observateur de l'autre : d'avoir
trop pensé à son genou et pas assez au genou
de Homar. Avant-hier, son épaule tombante
semble avoir eu pour effet de lui imposer
un jeu sobre, précis, impersonnel et fort
utile à ses coéquipiers de l'attaque. Que
Ben Ali valide n'ait pas réussi à neutraliser
ni même à inquiéter Pironti prouve simultanément
la méforme du noir Bordelais et la classe
du Marseillais
Derrière trois avants de pointe, faisant
montre d'une valeur irrésistible, l'allure
est difficile à soutenir et la comparaison
malaisée à supporter, pour deux jeunes intérieurs
Robin et Scotti libres de tout marquage,
jouent honnêtement sans attirer autrement
l'attention. |
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Aznar en avant, Bastien au milieu et Gonzalès
à l'arrière sont les piliers de l'édifice
marseillais. Olej confirme le sérieux de
son application et de son jeu ; il relègue
dans l'ombre et dans les zones de ballon
mort l'ailier opposé Rolland et il ne dédaigne
pas de passer à l'attaque, jusqu'à doubler
Pironti. Venezziano est, comme le 9 mai,
courageux et effacé.
Gonzalès, pourtant handicapé, prend dès l'abord
l'ascendant sur les avants bordelais et il
écarte sans mal tout danger et même toute
lointaine menace. Son expérience et sa maturité
de jeu déteignent sur son partenaire Patrone
qui, malheureusement, s'abandonne à des brutalités
inutiles, avec d'autant moins de raison que
sa taille, son poids et sa décision imposent
le respect |
Scotti est à l'origine du deuxième but obtenu
par Dard. Robin tente de rééditer le tir
de loin qui se traduisit par le second but
de Marseille, le 9 mai, mais exceptionnel
a justement pour caractère de ne pouvoir
être aisément renouvelé.... |
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Bastien, malgré plusieurs erreurs de conduite
du ballon, déploie une activité défensive
et dépense, principalement sur remise en
jeu de la touche, une ardeur offensive qui
lui donnent une autorité s'imposant aussi
bien à ses adversaires qu'à ses coéquipiers
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Le gardien Delachet, qui n'a rien ou presque
rien à faire qu'à porter la Coupe après le
match et pendant ce tour d'honneur qui n'ajoute
rien à la gloire de l'équipe, ne commet aucune
erreur durant les trois seules phases de
jeu qui nécessitent son intervention. Les
esprits superficiels ont beaucoup daubé,
il y a quinze jours, sur le compte de ceux
qui, comme nous, affirment que le vrai jeu
d'équipe comporte une organisation d 'action
et un placement des joueurs.
Voyez les clubs de Marseille et de Bordeaux,
déclaraient-ils ; ils jouent bien et ne s'embarrassent
pas de systèmes !Voire ! |
L'O.M., s'il ne pratique pas le M en défense,
utilise en attaque un W exemplaire, et je
pense que l'équipe serait plus forte encore
avec deux arrières jeunes et rapides, capables
de s'éloigner sans risques du centre du terrain.Les
Girondins nous ont montré samedi à quel niveau
extrêmement bas tombe une équipe jouant sans
méthode, lorsque les joueurs sont fatigués
ou hors de forme.
Le succès de Marseille a fourni une nouvelle
occasion de comparer la valeur du football
Sud à celle du football Nord.
Gardons-nous de donner dans ce travers des
confrontations inopportunes.
Pour nous, il n'y a qu'une France et des
équipes qui jouent bien d'autres qui jouent
mal. |
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